Le parcours de l'eau de sa source au robinet

Le captage
Le BRGM et le SIGES Aquitaine (Système d'information pour la gestion des eaux souterraines en Aquitaine) proposent de découvrir le parcours de l'eau, de sa source au robinet, en 5 étapes. Etape 1 : le captage de l'eau souterraine.
© BRGM - 2014

captage1
ceseau
L’origine de l’eau du robinet
En France, 62 % de l’eau potable provient des nappes souterraines (
nappes
superficielles et profondes) et 38 % des eaux de surface (fleuve, rivière ou lac). L’eau étant chère à transporter, ce sont généralement les ressources naturelles proches d’une commune qui sont exploitées pour produire l’eau potable.
En comparaison avec les eaux superficielles, les
nappes
dites profondes présentent toutefois l’avantage d’être de meilleure qualité d’un point de vue chimique et bactériologique. En s’infiltrant profondément dans le sol et en parcourant de longues distances au travers des roches, l’eau est naturellement filtrée par le milieu. Elle présente également une faible vulnérabilité vis-à-vis des pollutions accidentelles. En Gironde par exemple, 99% de l’alimentation en eau potable provient des
nappes
d’eau souterraines, essentiellement des aquifères profonds de l’Oligocène et de l’Eocène (du nom des couches géologiques qui les contiennent). Ainsi, nous buvons une eau prélevée de 100 à 800 m de profondeur, qui a près de 20 000 ans !
Retrouvez des explications complémentaires dans la rubrique consacrée à l’Hydrogéologie.
L’eau des nappes souterraines, une ressource surexploitée dans certains départements
Environ 150 millions de m3 sont extraits chaque année en Gironde dans ces
nappes
profondes, destinés principalement à l’alimentation en eau potable (et dans une moindre mesure à l’agriculture (16%) et à l’industrie (2%)).
Surexploitées, certaines de ces
nappes
, comme celle de l’Eocène, sont en déficit depuis plusieurs dizaines d’années. Un Schéma D’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) a été mis en place dans le bassin Adour-Garonne dans le but de préserver cette ressource. De nombreuses actions sont menées conjointement par les collectivités, syndicats mixtes et associations pour sensibiliser les usagers à l’économie d’eau, qu’ils soient agents publics ou simples habitants.
D’ailleurs, en bordure de littoral, les
nappes
présentent un risque important de salinisation, c’est-à-dire que les eaux marines s’infiltrent dans le sol pour compenser la baisse de pression (alors que normalement, ce sont les
nappes
qui se déversent dans l’océan).
Des forages sous haute surveillance
Le captage des nappes souterraines nécessite la réalisation de forages. Ils sont réalisés par des entreprises spécialisées, en plusieurs étapes (foration, pose du tubage et mise en place de la tête de forage ).
Téléchargez le livret « Puits et forages privés : 4 règles simples pour réussir votre projet » (pdf - 11,5 Mo).
![]() captage2 ceseau Forage réalisé avec une tarière (© BRGM ) |
![]() captage3 ceseau Foreuse sur chenille (© BRGM ) |
Afin d’éviter toute pollution de la ressource, la réalisation d’un
forage
est règlementée et soumise à des exigences techniques, définies par arrêté interministériel. Un périmètre de protection, mis en œuvre par l’Agence Régionale de Santé (ARS), est également établi autour de la zone de captage.
Maryline GRAVEZ, Directrice du Syndicat Intercommunal d’Eau Potable et d’Assainissement du Nord Libournais (SIEPA Nord Libournais)
Missions : gestion administrative, financière et juridique du Syndicat
« Notre syndicat compte 14 communes adhérentes, soit 16 555 habitants. Cela représente 7 200 abonnés pour l’eau potable. Pour le service d’alimentation en eau potable, nous avons un contrat de délégation avec la société Agur depuis 2007. Il y a beaucoup de transparence et nous avons vraiment instauré une relation de confiance. Les agents se sont d’ailleurs implantés sur le secteur par souci de proximité et de réactivité. Nous avons également beaucoup travaillé sur la qualité du service. Aujourd’hui, le prélèvement pour l’eau potable est assuré par trois forages récemment renouvelés, dont celui de Bayas qui est un forage de substitution. Il pompe à 70 mètres de profondeur dans la nappe non déficitaire de l’Eocène nord ».
Traitement
Le BRGM et le SIGES Aquitaine (Système d'information pour la gestion des eaux souterraines en Aquitaine) proposent de découvrir le parcours de l'eau, de sa source au robinet, en 5 étapes. Etape 2 : le traitement de l'eau brute.
© BRGM - 2014

traitement1
ceseau
Les étapes, de l’eau brute à l’eau potable
L’eau brute, en fonction de l’endroit où elle est captée, doit subir un ensemble de traitements plus ou moins complexes avant d’être distribuée. On dit alors qu’elle est « propre à la consommation humaine ».
Chaque année en France, 15 300 usines d’eau potable produiraient environ 6 milliards de m3 d’eau (source : SOeS-SSP 2008).
Les étapes classiques du traitement, généralement automatisées par commande informatique, sont :
- le dégrillage : l’eau brute passe à travers des grilles pour arrêter les corps flottants et les gros déchets ;
- le tamisage : il s’agit d’un filtrage plus fin à travers des tamis destinés à arrêter les déchets plus petits comme des grains de sable ou du plancton ;
- la floculation et la décantation : l’ajout d’un produit coagulant dans l’eau permet d’agréger les matières en suspension. Du fait de leur poids, ces floculats ainsi formés tombent au fond d’un bassin de décantation ;
- la filtration : elle permet l’élimination des dernières particules en suspension, souvent invisibles. Elle se fait au travers de matériaux classiques, comme des colonnes de sable , ou absorbants, comme du charbon actif (parfois au travers de membranes de micro, voire nanofiltration) ;
- les traitements spécifiques : ils permettent en fonction des eaux, d’améliorer les paramètres chimiques (acidité, dureté, teneur en fer…) ou les qualités organoleptiques de l’eau (saveur, odeur, limpidité) ;
- la désinfection et/ou la chloration : c’est une étape essentielle permettant de neutraliser les virus et les bactéries pathogènes ; on peut injecter de l’ozone gazeux ou utiliser des ultraviolets. Pour préserver la qualité de l’eau tout au long de son parcours dans les canalisations avant d’arriver au robinet, une infime quantité de chlore est également ajoutée dans l’eau.
L’eau issue des nappes profondes en Aquitaine étant de bonne qualité, elle ne nécessite que peu de traitements pour être rendue potable.
Que dit la loi ?
« Toute personne qui offre au public de l’eau en vue de l’alimentation humaine, à titre onéreux ou à titre gratuit et sous quelque forme que ce soit, est tenue de s’assurer que cette eau est propre à la consommation ». Code de la santé publique (article L.1321-1)
Les communes sont donc responsables de la qualité de l’eau potable, que la distribution soit assurée en régie publique ou en délégation.
Là encore, une réglementation stricte…
Des contrôles sanitaires sont effectués tout le long du réseau de distribution par les Agences Régionales de Santé (ARS), sous l’autorité du préfet. En effet, un ensemble de normes régit la qualité de l’eau d’un point de vue chimique, physique et microbiologique. Cette réglementation, s’appuyant sur les travaux médicaux et les recommandations en vigueur de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), est élaborée par le ministère en charge de la Santé.
Ainsi, l’eau « propre à la consommation humaine » doit répondre à environ 70 critères de qualité.
Il existe en premier lieu des limites de qualité, très importantes car elles peuvent avoir une incidence sur la santé. Ce sont les paramètres microbiologiques (escherichia coli, entérocoque, etc.) et chimiques (arsenic, cadmium, cyanure, hydrocarbures, mercure, nitrates, plomb, pesticides, etc.).
Il existe ensuite des références de qualité. Ce sont des paramètres indicateurs (couleur, saveur, transparence de l’eau). On va surveiller la composition en éléments minéraux (fer, manganèse, sodium, etc.), mais aussi la température, la conductivité , le pH ou les chlorures. Il faut que l’eau fournie aux usagers présente des qualités organoleptiques agréables, qu’elle soit claire, inodore et équilibrée en sels minéraux.
Bien sûr, en fonction de l’avancée des recherches scientifiques et de l’évolution de nos sociétés, ces exigences sanitaires évoluent dans le but de satisfaire au mieux nos besoins et garantir la santé de tous.
Christophe VIGIER, Agent d’exploitation Nord Libournais, Société Agur
Missions : entretien des stations de traitement, suivi du réseau et suivi clientèle
« L’eau, ici, est de bonne qualité. Elle est acide et ferrugineuse, mais cela ne nécessite que peu de traitements. Nous commençons par une neutralisation pour faire remonter le pH de l’eau brute. Cela permet de le ramener à 7,5. Ensuite, pour enlever le fer, nous injectons de l’air. Cela crée une réaction chimique qui provoque son oxydation. Après un passage par des filtres composés de sables, l’eau reçoit une injection de chlore, puis elle est stockée dans une cuve souterraine avant d’être envoyée dans le réseau. Le fonctionnement de notre station de traitement à Bayas est entièrement géré par un système automatisé. C’est un peu comme le cerveau de la station. Cela permet un contrôle optimal ».
Stockage
Le BRGM et le SIGES Aquitaine (Système d'information pour la gestion des eaux souterraines en Aquitaine) proposent de découvrir le parcours de l'eau, de sa source au robinet, en 5 étapes. Etape 3 : le stockage.
© BRGM - 2014

stockage1
ceseau
La mise sous pression de l’eau potable
Une fois traitée, l’eau potable est stockée dans des « réservoirs sur tour », plus communément appelés châteaux d’eaux, ou dans des réservoirs enterrés si la commune dispose d’une zone à topographie élevée.
Ce réservoir est une zone tampon entre le débit fourni par la station de traitement et le débit demandé par les usagers. Mais c’est aussi un moyen de mettre l’eau sous pression. Lorsque l’eau sort du château d’eau, sa pression est élevée. Un château d’eau de 100 m de hauteur fournira ainsi une eau à 10 bars. C’est ce qui lui permet d’être acheminée jusque dans les habitations et les immeubles à plusieurs kilomètres de distance, avec une pression moyenne de 2,5 bars. Les distributeurs d’eau potable se doivent de fournir une pression d’au moins 1 bar à leurs abonnés. Des stations de reprise sont parfois nécessaires ou des pompes, afin de redonner suffisamment de pression.
Des contrôles sanitaires de l’eau potable sont à nouveau effectués dans ces zones de stockage afin de s’assurer de la qualité de l’eau qui arrive aux abonnés.
Le contrôle et la régulation des flux
Un château d’eau contient environ 1 000 m3 d’eau potable, mais les plus grands châteaux d’eau peuvent contenir plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes. Des débitmètres et des compteurs sont installés à l’entrée comme à la sortie afin de mesurer tous les flux. Le débit est généralement plus important en journée puisque c’est à ce moment-là que l’ensemble des habitants d’une ville utilise l’eau. Le pic est souvent en fin de journée, lorsque l’ensemble des usagers rentrent chez eux.
Pour une ville d’environ 8 000 habitants, le débit moyen en journée est de 60 m3/h, contre 6 à 9 m3/h la nuit. Un débit trop important la nuit peut être un indicateur de fuites dans le réseau.
Avec les nouvelles technologies, les réservoirs aériens et enterrés, comme l’ensemble du réseau de distribution, sont équipés aujourd’hui de stations locales automatisées qui permettent de réguler les flux entrants et sortants en fonction des besoins, et également d’alerter en cas de débits anormaux.
Distribution
Le BRGM et le SIGES Aquitaine (Système d'information pour la gestion des eaux souterraines en Aquitaine) proposent de découvrir le parcours de l'eau, de sa source au robinet, en 5 étapes. Etape 4 : la distribution et le contrôle des fuites.
© BRGM - 2014

distribution1
ceseau
Qui fait quoi ?
La distribution de l’eau potable, de la source jusqu’au robinet, est un service public confié aux collectivités territoriales (municipalités, syndicats intercommunaux…). Ils déterminent librement leur mode de gestion : soit directement, on parle alors de régie publique, soit en déléguant à une entreprise privée. On parle dans ce cas de délégation de service public (ou d’affermage).
Les enjeux de la distribution d’eau potable
Une fois rendue potable, l’eau est envoyée grâce à des pompes dans des réservoirs où elle est stockée, avant d’être acheminée par un réseau de canalisations souterraines dans les habitations. La distribution commence donc à la sortie de la station de traitement pour aller jusque dans les habitations. Le compteur marque le début du réseau privé.
Le rendement moyen du réseau français est d’environ 75%, ce qui signifie que de nombreuses fuites sont encore présentes dans ces réseaux (Données : SISPEA -
DDT
(M), 2009).
Un des enjeux de l’ensemble des acteurs de la distribution de l’eau potable est de limiter au maximum les fuites pour tendre vers un rendement optimal.
La recherche de la performance
Les innovations récentes permettent d’améliorer progressivement la performance du service. Il existe aujourd’hui des méthodes de diagnostic de l’état de dégradation des conduites, mais aussi des outils de modélisation hydraulique et des systèmes d’information géographique (
SIG
), pour suivre en temps réel la distribution. Il est possible, par exemple, d’être alerté immédiatement en cas de fuite. Certaines communes ou communautés de communes, procèdent également à la sectorisation du réseau, avec l’implantation de débitmètres à chaque tronçon.
L‘utilisation de capteurs acoustiques plus performants permet d’être plus réactif qu’auparavant, ou encore, la mise en place de renouvellement planifié des réseaux permet d’anticiper sur la rupture éventuelle de canalisations, souvent en raison de leur âge avancé.
Les contrats de gestion du service d’eau potable engagent de plus en plus les entreprises sur une performance de service, en termes de limitation des fuites et de préservation de la ressource.
En ce qui concerne les relations aux abonnés, le développement de la télé-relève des compteurs se développent à grand pas.
Daniel VALADE, Chef de secteur Société AGUR sur le Nord Libournais
Missions : relations avec la collectivité et les élus, gestion du contrat et des équipes, planification des agents, suivi clientèle
« Notre premier objectif est de ne pas faire subir de nuisances à nos abonnés. Pour cela, nous veillons au bon état et au bon fonctionnement des installations, nous garantissons la qualité de l’eau distribuée. Nous recherchons également les fuites : nous sommes ici en zone rurale avec un grand linéaire de réseau, ce qui ne rend pas la tâche aisée. La collectivité a mis en place un outil de sectorisation, avec de nombreux compteurs installés par zone et équipés de télégestion. Cet outil permet à nos agents d’être très réactifs en cas de fuite. On a atteint aujourd’hui un rendement sur le réseau de 85%, ce qui est un très bon niveau de performance ».
Consommation
Le BRGM et le SIGES Aquitaine (Système d'information pour la gestion des eaux souterraines en Aquitaine) proposent de découvrir le parcours de l'eau, de sa source au robinet, en 5 étapes. Etape 5 : la consommation.
© BRGM - 2014

consommation1
ceseau
Les usages de l’eau potable
L’eau potable, une fois acheminée, est utilisée pour un grand nombre d’activités : usages en logements privés et bailleurs sociaux, activités économiques, usages collectifs (piscine, école, arrosage…), sans compter les fuites après compteur et les pertes sur le réseau public. L’agriculture, quant à elle, utilise préférentiellement l’eau superficielle.
En Gironde, les usages domestiques ou assimilés représentent 66% des prélèvements pour l’alimentation en eau potable, soit 80 millions de m3 prélevés chaque année.
Combien consomme-t-on ?
Un français consomme en moyenne 130 litres d’eau potable par jour. Le premier poste de consommation dans un logement est la salle de bain (40%) puis les WC (15%). Sachant qu’un robinet a un débit de 12 L/min et une douche de 18 L/min, les consommations domestiques sont très importantes :
- bain = 150 à 200 litres
- douche (5 min) = 70 à 100 litres
- chasse d’eau = 10 litres (3 à 6 litres avec les chasses économiques)
- lessive en machine = 60 à 80 litres (jusqu’à 130 L pour les modèles anciens)
- vaisselle en machine = 25 à 40 litres (une vaisselle à la main consomme davantage)
- arrosage du jardin = 15 à 20 litres par m2
- robinet qui goutte = jusqu’à 100 litres/an
Nous buvons enfin 1,5 à 2 litres d’eau par jour.
Combien ça coûte ?
Le prix de l’eau varie considérablement d’une commune à l’autre : de quelques centimes d’euros à plus de 6 euros le mètre cube. Par exemple, le prix total du m3 pour la CUB (Communauté Urbaine de Bordeaux) est de 3,20 €. Ce tarif comprend : l’alimentation en eau potable (captage, pompage, traitement, distribution), les activités de dépollution des eaux usées (collecte, transport, stockage, épuration, retour au milieu naturel), les taxes et les redevances.
Une famille de quatre personnes consomme environ 130 à 185 m3 par an, soit une facture équivalente de 450 à 600 euros. Avec du matériel hydro-économe et des gestes adaptés, il est toutefois possible de baisser sa facture.
Patrick EISENBEIS, Chargé de mission économie d’eau et document d’urbanisme, SMEGREG
Missions : animation départementale pour la diminution des prélèvements dans les nappes profondes, intégration des recommandations du SAGE dans les documents d’urbanisme
« La priorité du Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux
Nappes
profondes de Gironde est d’optimiser les usages de l’eau potable. Pour diminuer les pertes dans les réseaux, un travail de diagnostic des réseaux de distribution a été mis en place avec une sectorisation, une politique de recherche de fuites et une programmation du renouvellement des réseaux.
Pour limiter les consommations, nous sensibilisons les particuliers via les Espaces Info Economie d’Eau, le site jeconomiseleau.org, et également les écoles, via le dispositif « L’Eau, un enjeu majeur ». Nous distribuons du matériel hydro-économe dans le cadre du projet européen Mac Eau. 80 000 kits vont être distribués aux habitants de la Gironde, ce qui va nous permettre de mesurer efficacement les économies d’eau réalisées. Nous accompagnons aussi les entreprises en fonction des demandes et les collectivités qui se doivent de montrer l’exemple. Nous les aidons à réduire leur consommation, notamment pour l’arrosage des espaces verts, en cherchant de nouvelles ressources ou en utilisant des plantes moins gourmandes en eau ».