Traçages hydrogéologiques
Un traçage hydrogéologique est caractérisé par un point d’injection (injection d’un traceur), et d’un ou de plusieurs point(s) de surveillance (du traceur injecté).
Cette rubrique rassemble des informations sur les traçages hydrogéologiques pour la région Centre-Val de Loire. Elle présente les résultats d’un inventaire régional réalisé en 2014-2016, ainsi que des informations sur la déclaration et la bancarisation des données de traçages.
Cette rubrique a été réalisé par le CETRAHE (Université d’Orléans) en collaboration avec le BRGM, en janvier 2019.
Il a pour objectif de présenter les principales informations sur l’historique des traçages hydrogéologiques, leurs applications et les principaux traceurs utilisés.
Historique, applications, principaux traceurs
Historique
Les techniques de traçage trouvent leur origine en hydrogéologie karstique (Mangin et al., 1976).
Depuis l’antiquité, le principe du traçage artificiel a été utilisé pour mettre en évidence les relations entre les pertes et les sources des aquifères karstiques (Käss, 1998). L’emploi des traceurs fluorescents et salins dans les études relatives aux eaux souterraines marque le début de la recherche moderne sur l’écoulement des eaux souterraines (Atkinson et Smart, 1979).
Le traçage accidentel le plus connu est sans doute celui ayant démontré que la Loue était alimentée en partie par le Doubs. En août 1901, à Pontarlier (Doubs, 25), l'usine Pernod s'enflamme et une grande quantité de Pontarlier (boisson anisée) est alors déversée dans le Doubs. Le lendemain, les riverains de la Loue sont surpris de l'odeur anisée se dégageant de leur rivière... C'est ainsi qu'il a été découvert que la Loue en plus d'être un affluent du Doubs, en était aussi une résurgence.
Les premiers traçages à l’uranine (fluorescéine sodique) en France ont été réalisés par Marboutin en 1901, dans le Val d’Orléans, pour démontrer l’existence d’une relation entre les pertes de la Loire situées à Saint-Denis-de-l’Hôtel, et les exutoires de ce système souterrain telle que la source du Bouillon à Orléans-la-Source.
Dans les années 30, les travaux de Martel et Fournier ont développé l’approche des circulations karstiques d’après la synthèse de 75 expériences de coloration. L’intérêt pour la méthode de traçage s’est accru lorsque les problèmes de vulnérabilité et de pollution de la ressource en eau souterraine ont pris de l’importance, d’autant plus que les besoins croissants en eau ont amené à exploiter de plus en plus les réserves karstiques (Bakalowicz, 1977).
Applications
Dans le cadre du suivi et de la gestion durable de la ressource en eau, les principales applications des techniques de traçages sont :
- la caractérisation des systèmes hydrogéologiques (vitesse de circulation des eaux souterraines, porosité cinématique, dispersivité du milieu), et l’estimation de leurs ressources en eau ;
- la délimitation des aires d’alimentation et des périmètres de protection des ouvrages d’alimentation en eau potable ( AEP ) ;
- les études d’impact des rejets de stations d’épuration dans le milieu naturel ;
- les transferts de pollutions en milieu industriel.
On distingue généralement 2 catégories de traçages :
- Les traçages de reconnaissances (ou exploratoires), en milieu karstique, dont la finalité est de déterminer l’appartenance d’un point (d’injection) au bassin d’alimentation d’une source ou d’un ensemble de sources. Le résultats attendu est binaire : relation ou pas entre les points testés.
- Les traçages de simulation dont la finalité est de connaître de façon approfondie les paramètres caractéristiques du transit du traceur entre un point d’injection et un point de restitution. Le résultat du traçage est alors utilisé pour évaluer les conditions de restitution du produit injecté dans le milieu permettant de simuler les éventuelles pollutions.
Principaux traceurs
Un traceur artificiel est défini comme « toute substance introduite volontairement dans l’eau et absente dans les conditions naturelles dans l’ aquifère étudié, pour l’identifier et permettre d’observer son mouvement ». Parmi les principaux traceurs, on peut citer : sels, produits colorants ou fluorescents, corps en suspension, eau marquée par isotope radioactif, etc.
Les propriétés et les caractéristiques du traceur choisi permettent d’imiter et d’observer le mouvement de l’eau. Le traceur idéal doit être pratiquement semblable à l’eau : bien s’y mélanger et posséder une densité très proche. Il doit être détectable à de très faibles concentrations, dépourvu de toute toxicité à l’égard de l’homme et de l’environnement, et ne pas être sujet à l’adsorption. Il doit aussi être stable, sans pour autant produire un « effet de mémoire » dans les aquifères.
Ces exigences sont strictes et il n’est donc pas étonnant que les traceurs qui satisfont ces conditions soient peu nombreux. Les traceurs les plus fréquemment utilisés en hydrogéologie sont les produits fluorescents et, plus marginalement, les traceurs salins.
Les traceurs fluorescents constituent le groupe le plus utilisé. Ils sont faciles à détecter à de très faibles concentrations, conservatifs en milieu souterrain et simples à manipuler. Dans la pratique, ils se sont imposés progressivement comme les traceurs artificiels les plus efficaces. A l’inverse, en raison de leur présence naturelle dans les eaux, et leur manque de stabilité dans le milieu, les sels sont plutôt considérés comme des traceurs complémentaires dans le cadre des multi-traçages (plusieurs traceurs injectés simultanément), ou lorsqu’une éventuelle coloration visuelle de l’eau doit être évitée (ex : captages AEP ).
Les traceurs fluorescents et salins les plus couramment utilisés ainsi que leurs caractéristiques, sont synthétisés dans les deux tableaux ci-dessous :
Traceurs fluorescents | Longueur d’onde - Excitation (nm) | Longueur d’onde - Emission (nm) | Solubilité à 20°C (g/L) | Seuil de détection (eaux optiquement propres) (µg/L) | Seuil de visibilité à l’œil (µg/L) | Interférences avec d’autres traceurs fluorescents ? |
---|---|---|---|---|---|---|
Uranine | 490 | 515 | 500 | 0.001 | 25 - 50 | Eosine |
Eosine | 513 | 537 | > 600 | 0.01 | 50-100 | Uranine |
Sulforhodamine B | 562 | 585 | 50 | 0.05 | 100 - 500 | Sulforhodamine G |
Sulforhodamine G | 532 | 552 | 5 | 0.01 | 80 - 120 | Sulforhodamine B, Eosine |
Naphtionate | 320 | 420 | 240 | 0.085 | invisible | Amino G. acide, Tinopal |
Amino G. Acide | 345 | 452 | 0.085 | invisible | Naphtionate, Tinopal | |
Tinopal CBS-X | 350 | 435 | 25 | 0.1 | invisible | Amino G.acide, Naphtionate |
Dyasine jaune | 449 | 477 | 0.05 | 100 - 500 | Aucune |
Traceurs salins | Solubilité (g/L) à 20°C | Seuil de détection (µg/L) |
---|---|---|
Lithium (Chlorure) | 832 | 0.5 |
Iodure (de potassium ou de sodium) | Très soluble | 5 |
Chlorure (de sodium ou te potassium) | KCl : 313 / NaCl : 358 | 2000 |
Bromure (de potassium) | 25 | 20 |
Inventaire régional des opérations de traçage
Un inventaire des opérations de traçages hydrogéologiques a été réalisé dans le cadre du SIGES Centre-Val de Loire, et mis à disposition à partir de mai 2016. Le travail a été mené par le BRGM , en collaboration avec CETRAHE.
Il fait suite à un premier inventaire réalisé en 2000, par le laboratoire d’hydrogéologie de l’Université d’Orléans (M. Lepiller), dont CETRAHE a pris la suite.
L’inventaire réalisé entre 2014 et 2016 a permis de rassembler les principales informations sur les traçages effectués sur le territoire régional, principalement en domaine carbonaté fissuré/karstique, mais également dans d’autres types de contexte géologiques et hydrogéologiques.
Les résultats de cet inventaire sont présentés dans un rapport de synthèse.
Une bancarisation des données a été réalisée à cette occasion, grâce à un travail harmonisé avec d’autres régions (Midi-Pyrénées et Aquitaine), pour la mise en ligne d’une base de données nationale : la BD Traçages.
Les données de traçage sont visualisables sur l’espace cartographique du SIGES . Il est possible d’accéder à des fiches de consultation présentant les données liées aux opérations réalisées.
Traçages artificiels en hydrogéologie : les bonnes pratiques
Malgré ses atouts et la simplicité du concept, la méthode de traçage est peu utilisée. Elle reste mal connue, notamment des concepteurs et gestionnaires de l’eau.
Afin de proposer une vision globale d’une opération de traçage, cet article présente de manière synthétique quelques éléments essentiels des bonnes pratiques de réalisation des traçages.
Il a été réalisé par le CETRAHE (Université d’Orléans) en collaboration avec le
BRGM
, en janvier 2019.
Mise en œuvre des traçages
Avant la réalisation d’un traçage, des étapes préliminaires sont à prévoir :
- La 1ère est de bien déterminer les objectifs du traçage : traçage de reconnaissance des circulations souterraines, de simulation du transfert d’une pollution, test de caractérisation de l’ aquifère avec la détermination des paramètres hydrodispersifs (vitesse de circulation, porosité cinématique, dispersivité), etc.. Cette étape est très importante car les choix stratégiques qui vont être adoptés par la suite seront un compromis entre les objectifs et le coût.
- La 2ème étape consiste à récolter un maximum d’informations existantes, ainsi que la documentation sur les traçages antérieurs. Les informations récoltées doivent comprendre l’ensemble des données géographiques, topographiques, géologiques, hydrogéologiques, et anthropiques (usages d’eau, captages, etc..). Quant aux traçages antérieurs, même s’ils n’ont pas une fiabilité satisfaisante par rapport aux critères d’évaluation d’aujourd’hui, ils seront riches d’informations et très utiles pour éviter certains écueils.
- La 3ème étape est la reconnaissance du site où le traçage va être réalisé. Elle consiste à faire le repérage des points d’injection potentiels (accès direct ou via une zone non saturée, capacité d’absorption, possibilités de mises en charge et de débordements, besoin de chasse d’eau, accessibilité notamment aux véhicules transportant l’eau destinée à la chasse,…) et des points de restitution potentiels (captages, sources non captées, exutoires en eau de surface, fonctionnement, accessibilité, mesure éventuelle de débit,…). A l’issue de cette visite, il est important de faire un examen de la faisabilité de mise en place des différents dispositifs de surveillance (prélèvements manuels, installation de préleveur automatique, installation de fluorimètre, fixation de détecteurs au charbon actif, influence des régimes de pompages, influence de chloration,…) et d’anticiper les conditions hydrologiques qui peuvent être différentes (et varier) au moment du test.
Après avoir abordé ces étapes, on peut alors procéder au dimensionnement du traçage.
Traçage ou multi-traçage ?
Un multi-traçage consiste à injecter simultanément différents traceurs, en plusieurs points d’injection. Il permet de répondre à plusieurs questions à la fois, de réduire le coût et de gagner un temps considérable. Par contre, il impose un choix judicieux des traceurs utilisés, suffisamment conservatifs dans le contexte, et sans présenter d’interférences analytiques entre eux.
A noter : il est conseillé d’éviter les multi-traçages impliquant plus de 3 à 4 traceurs, au risque d’utiliser des traceurs moins performants, et d’une confusion dans le suivi et l’interprétation de la (des) courbe(s) de restitution(s).
Le choix du (des) traceur(s) est particulièrement important pour le dimensionnement des multi-traçages, car il détermine le résultat final selon ses performances et il influence également les autres choix stratégiques (quantité d’injection et types de surveillance).
La bonne connaissance des propriétés physico-chimiques des traceurs ainsi que leur comportement selon le (les) milieu(x) permet de mieux adapter le traceur au contexte géologique, physique et hydrologique.
La quantité de traceur à injecter est toujours une question délicate. Plusieurs formules existent, mais elles supposent une connaissance a priori du milieu et des paramètres le représentant, l’idéal est d’avoir déjà réalisé un traçage dans un contexte équivalent. Le logiciel TRAC (gratuit), dans son volet « Simulation », permet de faire des estimations nécessitant de sélectionner la solution analytique adaptée au contexte hydrogéologique, correspondant au mieux au transit du traceur dans le système traçage choisi.
Dans la pratique, la quantité est estimée à dire d’expert, au regard du contexte hydrogéologique. Entre l’empirisme, l’intuition et l’expérience, pour trancher la question, il faut tenir compte de deux éléments déterminants : la dilution que le traceur devrait subir, souvent approchée au moyen de la distance et la performance analytique du traceur, et les modes de surveillance.
A noter : Le traçage ne peut pas renseigner sur la totalité du système hydrologique ou hydrogéologique. Les résultats se rapportent uniquement à la partie testée. Pour extrapoler à une autre partie de l’ aquifère il faut être certain de l’homogénéité du milieu.
Les bonnes pratiques impliquent la transmission d’une information préalable à l’opération de traçage auprès des autorités ( DDT , gendarmerie, etc.) et des riverains (mairie). Cela permet notamment d’éviter les craintes et alertes liées à la coloration de l’eau, dans le cas de traceurs fluorescents ou colorants.
Avant toute injection, il est nécessaire de réaliser des prélèvements d’eau d’échantillons témoins, et si le protocole inclut l’emploi de détecteurs au charbon actif, il s’agit de prévoir également l’immersion de fluocapteurs « témoins » à une fréquence adaptée.
Pour les traçages de reconnaissance, la réalisation en période de hautes eaux permet généralement de bénéficier de conditions plus favorables, du fait d’écoulements plus rapides en ciblant préférentiellement une période de décrue. Il est recommandé d’effectuer les traçages de simulation dans des conditions hydrologiques contrastées (basses et hautes eaux), car les résultats obtenus peuvent fluctuer dans de larges proportions.
Mode de suivi et d’analyses
Lors d’une opération de traçage, la composante analytique est d’une grande importance. Une interprétation fiable ne peut être formulée qu’à partir de résultats basés sur des mesures rigoureusement contrôlées et une logique analytique.
Le mode de suivi et d’analyses dépend de plusieurs facteurs :
- type(s) de traceur(s) utilisé(s) : fluorescents, salins,… ;
- type de point(s) d’eau suivi(s) : source, captage, forage , rivière,… ;
- possibilités d’installation de matériel : place disponible, sécurité, alimentation électrique, accès…) ;
- budget disponible.
La méthode la plus fiable de suivi et d’analyse est le prélèvement d’eau avec analyse au laboratoire. Les appareils du laboratoire permettent aujourd’hui la détection des substances en très faible concentration. Pour les traceurs fluorescents, les spectrofluorimètres de laboratoire (mesure directe de fluorescence) permettent d’atteindre des limites de détection très basses, de l’ordre de 0.001 µg/L pour l’uranine. L’analyse spectrale réalisée par un spectrofluorimètre constitue un diagnostic indispensable de détection et d’interprétation d’un traçage, d’autant plus que les quantités d’injection sont de plus en plus réduites, afin de rester sous le seuil de visibilité aux points de restitution.
Les instruments de terrain permettant des mesures in situ contribuent aussi à l’amélioration du suivi des traceurs. Des instruments de plus en plus performants sont disponibles : fluorimètres de terrain, électrodes spécifiques, conductimètres sensibles, etc.
Pour les traceurs fluorescents, l’utilisation du fluorimètre de terrain peut être d’une grande utilité. D’un usage facile, ces appareils permettent d’obtenir des résultats en temps quasi-réel, même en cas de multi-traçages. Il est toutefois conseillé d’éviter de les utiliser comme seul dispositif de suivi, en particulier pour les multi-traçages. En effet, les variations de la fluorescence naturelle des eaux enregistrées, ainsi que les interférences entre traceurs, peuvent être interprétées à tort comme des restitutions. Il est donc conseillé de coupler ce suivi par des prélèvements, automatiques ou manuels, afin de vérifier par analyse spectrale au laboratoire la présence ou non du traceur.
En ce qui concerne les détecteurs au charbon actif (fluocapteurs) parfois mis en œuvre pour les traceurs fluorescents, il est conseillé de les utiliser en dernier recours, lorsque les conditions de terrain ne permettent pas d’autre mode de détection. Ils peuvent aussi être utilisés comme un moyen secondaire de détection pour élargir spatialement le suivi dans le cadre des traçages de reconnaissance, en surveillance de points « secondaires ». Toutefois, il convient de rester prudent pour l’interprétation des résultats qui en découlent. Parmi les traceurs courants, un suivi par fluocapteur ne peut être envisagé que pour les traceurs comme l’uranine ou l’éosine, avec un certain nombre de précautions (cf. note technique n°1 du CETRAHE). Les traceurs rouges (type Rhodamines) ne peuvent pas être suivis par cette méthode, le charbon actif ayant montré une incapacité à les fixer dans les conditions du laboratoire à des concentrations dans l’eau inférieures à 30 µg/L. La méthode des fluocapteurs est également inadaptée pour les traceurs fluorescents qui émettent dans le bleu (Naphtionate de sodium, l’Amino.G. acide, le Tinopal).
Enfin, les traceurs ioniques (sels) peuvent être dosés avec une grande précision analytique par différents appareils (Chromatographie ionique, spectrophotométrie, spectroscopie d’absorption atomique, etc.). Cependant, la présence naturelle de ces ions dans les eaux parasite leur détection en faible concentration, malgré la performance de l’appareil utilisé. Le dosage de la quantité injectée doit donc être particulièrement étudiée, de sorte qu’elle soit suffisamment élevée pour être détectée aux points de suivi et suffisamment modérée pour ne pas perturber les usages de l’eau (captages d’eau, milieux naturels).
Exploitation des données et interprétation
Les résultats d’un traçage sont illustrés par la courbe de restitution du traceur, donnant ainsi l’évolution des concentrations en fonction du temps, au point de restitution.
A partir de cette représentation, on peut déterminer des paramètres simples du transit tels que (non exhaustif) :
- le temps d'apparition du traceur,
- le temps modal,
- le temps de disparition du traceur,
- la durée de restitution.
La maitrise des débits au point de restitution permet de calculer un bilan de restitution (masse restituée et pourcentage de restitution), et la Distribution des Temps de Séjour (DTS) qui permet de décrire le transit du traceur dans le système traçage.
La DTS correspond à la fonction de densité de probabilité qui donne la probabilité qu’a une molécule de traceur de séjourner dans le système. C’est en effet la courbe de distribution du nuage de traceur. Lorsque l’injection peut être assimilée à une impulsion « Dirac » (soit une injection brève), la DTS donne la réponse impulsionnelle du système-traçage pour les conditions hydrologiques dans lesquelles il se trouve au moment du traçage, (Lepiller M. & Mondain P-H, 1986). A partir de la DTS, on peut calculer un certain nombre de paramètres décrivant le transit du traceur, tels que le temps moyen de séjour et la vitesse apparente.
L’interprétation des résultats est différente selon l’objectif. Pour les traçages de reconnaissance, l’objectif principal est d’affirmer avec exactitude l’appartenance d’un point d’injection à l’impluvium du système karstique. Pour les traçages quantitatifs (de simulation), il est important de décrire avec précision les modalités de transit du traceur, ainsi que les paramètres hydrodispersifs pour les traçages en milieu poreux. Des outils analytiques d’aide pour l’estimation des paramètres existent. Le logiciel TRAC, en mode « Interprétation » des traçages, permet d’interpréter un traçage à l’aide de différentes solutions analytiques par ajustement des paramètres de la solution et comparaison avec les données d’observation.
A noter : Il ne faut pas confondre les seuils de détection instrumentaux et les limites de détection réelles qui sont fortement dépendantes du niveau du bruit de fond dans les eaux naturelles et varient en fonction du traceur.
Enfin, à l’issue de l’opération de traçage et de l’interprétation des résultats, l’opérateur est invité à saisir les informations dans l’application de saisie de la BD Traçages. Il s’agit de la base de données, à vocation nationale, dédiée à la bancarisation des données.
Réalisation de traçages : déclaration et bancarisation des données
Avant de mener une opération de traçage, il est nécessaire de prévenir a minima les organismes chargés de la distribution d’eau potable ainsi que les services de la police de l’eau afin qu’ils puissent gérer les éventuels problèmes liés à ces essais (coloration de l’eau, etc.).
Il s’agit de bonnes pratiques qui sont attendues de la part des opérateurs.
A l’issue de l’opération de traçage et de l’interprétation des résultats, l’opérateur est invité à saisir les informations relatives au traçage dans l’application de saisie de la BD Traçages. Il s’agit de la base de données (nationale) développée et mise en ligne avec les données de l’inventaire de la région Centre-Val de Loire en 2016.
Pour effectuer la saisie des données d’une opération :
- accéder au site national de la BD Traçages, qui apporte des informations sur l’application de saisie ;
- si ce n’est déjà fait, demander un identifiant de connexion à l’application ;
- accéder à l’application de saisie de la BD Traçages, et compléter les différents onglets d’information (informations générales sur le traçage, points d’injection et de surveillance, résultats du traçage) ; les données sont ensuite soumises à un validateur régional qui pourra demander des compléments en cas de lacunes, ou valider le traçage qui sera ensuite accessible notamment via l’espace cartographique du SIGES .
Ces données viendront ainsi compléter les informations sur les traçages hydrogéologiques déjà saisies dans le cadre de l’inventaire, et visualisables sur l’espace cartographique du SIGES .
A partir de juin 2016, pour la réalisation d’études hydrogéologiques incluant la mise en œuvre d’un traçage, le cahier des charges établi par le donneur d’ordre devrait intégrer la nécessaire déclaration et bancarisation des résultats dans la BD Traçages. Les aides publiques apportées pour de telles études, notamment de la part des agences de l’eau, pourraient être conditionnées par la présentation dans le rapport final d’éléments confirmant la bancarisation des données.
Ce travail de bancarisation systématique des opérations de traçage doit permettre de valoriser ces données, et de profiter à tous les acteurs de l’eau : bureaux d’études, collectivités, etc.
NB : la saisie de traçages privés est également possible, ce qui permet de ne pas diffuser les informations sur les sites publics.
Opération de traçage des pertes du ruisseau de Limère aux sources de L’Archer (Loiret)
Le traçage artificiel des eaux souterraines est une méthode pratique et rapide de reconnaissance des écoulements souterrains. C’est une « procédure expérimentale » visant à rendre apparent et observable le déplacement de l’eau souterraine dans un aquifère suivant une ou des trajectoire(s) supposée(s) entre un point d’origine et un ou plusieurs autres points. La réalisation d’essais de traçage dans une région peut mettre en évidence les liens souterrains entre les pertes des cours d’eau et des résurgences afin d’avoir une meilleure connaissance de l’hydrographie locale et de permettre une meilleure gestion de ses eaux.
Le 16 janvier 2023, une opération de traçage a été réalisée à partir des pertes karstiques du ruisseau de Limère (Ardon), avec comme points de surveillance les sources de l’Archer (anciennement de la Pie, à Saint-Hilaire-Saint-Mesmin), les sources de Bellevue et Lepiller (La Chapelle-Saint-Mesmin), des sources du Loiret (Bouillon, Béchets, pont Saint-Nicolas) et la rivière de l’Ardoux (à Cléry-Saint-André).
Cette expérience de traçage a permis de prouver le lien hydrogéologique entre les pertes du ruisseau de Limère et les sources de l’Archer. L’origine des eaux de ces sources est donc multiple : les pertes de Limère et des pertes de la Loire. La composition de l’eau de ces sources suggérerait qu’elles pourraient être aussi alimentées par la nappe de Beauce. Un rapport complet sur l’opération est téléchargeable sur https://www.univ-orleans.fr/upload/public/2023-06/tra%C3%A7age-pertes%20de%20Lim%C3%A8re%2016Jan23_final.pdf.
Application des traçages dans le domaine de l’hydrogéologie
La présentation des tests de traçages en hydrogéologie et exemples d’application à la 9e conférence internationale sur les traceurs et les méthodes de traçage (T. Klinka, BRGM , Orléans, France) est disponible ci-dessous :