Outils de reconnaissance des ressources en eau souterraine pour l’eau potable en domaine de socle

Une des premières étapes à la recherche en eau correspond à la réalisation d’un inventaire des points d’eau existants sur le secteur d’étude. Elle permet de fournir des données intéressantes sur les forages d’une zone avoisinante à un site potentiel pour la recherche en eau, comme la géologie, le débit instantané ou la profondeur des venues d’eau. Néanmoins, il ne s’agit là que d’une étape préliminaire qui nécessite d’être complétée par des études plus poussées.  

La première étape qui peut être réalisée par le bureau d’études en charge de la recherche en eau correspond à l’étude géologique et hydrogéologique du site (Talbo et Vaubourg, 1977). Elle nécessite une analyse des cartes géologiques au 1/50 000 et des cartes topographiques, ainsi que des données hydrogéologiques existantes. Cette étape permet d’améliorer la connaissance du site d’étude d’un point de vue géologique (type de formation géologique, présence de failles, altération), mais aussi hydrogéologique si des données piézométriques sont présentes. De plus, elle peut faire appel à un examen des photographies aériennes dans le but de repérer les accidents ou les linéaments en surface. La photo-interprétation est un bon moyen pour localiser les zones potentiellement fracturées et donc favorables pour implanter un forage de reconnaissance. Elle doit être complétée par une exploration de terrain pendant laquelle sont recherchés des indicateurs de circulation des eaux souterraines (filons, altération, contrastes lithologiques et direction des failles et des fractures) (Schroëtter et al., 2020). Néanmoins, cette première étude permet de fournir uniquement des informations de surface. Dans ce cadre, il est délicat de localiser les fractures en profondeur. 

La deuxième étape possible correspond à une prospection géophysique. La méthode géophysique la plus courante dans la reconnaissance d’un site est la tomographie de résistivité électrique. Celle-ci consiste à réaliser les mesures le long d’une ligne d’acquisition multi-électrodes, en injectant un courant électrique dans le sol entre deux électrodes. Cette méthode permet d’obtenir un profil de résistivité apparente du sous-sol (cf. Illustration n°2) et de visualiser les fractures et les zones conductrices en profondeur. L’analyse des profils obtenus permet ainsi de confirmer l’interprétation des photographies aériennes et aide à une bonne implantation des forages de reconnaissance sur le site. 

Profil de résistivité et placement privilégié du sondage de reconnaissance (Mougin et al., 2021)

BRGM , 2021

Une fois le site d’exploration déterminé et après autorisation par les services en charge de la Police de l’eau, la troisième phase de l’étude correspond à la réalisation des travaux et la mise en place des ouvrages. Dans un premier temps, un sondage de reconnaissance est réalisé de façon à mesurer le débit instantané au soufflage en fin de foration. En Bretagne, dans les roches de socle, il est généralement réalisé avec la technique de forage au Marteau Fond de Trou (MFT). Si le débit instantané mesuré est supérieur au débit escompté, alors une nouvelle opération de foration a lieu à partir du sondage de reconnaissance qui sera alors réalésé et équipé pour devenir un forage d’exploitation.  

SI le débit n’est pas suffisant, le forage doit être rebouché dans les règles de l’art

Par la suite, des essais de pompage par paliers et de longue durée sont réalisés sur le forage d’exploitation, dans le cadre d’une étude hydrogéologique plus avancée. Ces essais de pompage sont obligatoires et nécessaires pour déterminer les paramètres hydrodynamiques, propriétés fondamentales de l’ aquifère capté. Dans un premier temps, un essai par paliers est réalisé dans le but de suivre le rabattement résultant de la nappe . Il consiste en des pompages successifs à débits croissants sur une courte durée, avec une phase de remontée entre chaque palier. A partir de cet essai, le débit critique peut être estimé à partir de la courbe du débit en fonction du rabattement. Il s’agit du débit au-delà duquel l’écoulement devient turbulent et n’assure plus un apport d’eau constant : il correspond au débit qu’il ne faudra pas dépasser pendant l’exploitation.

Dans l’exemple ci-dessous, le débit critique est de 130 m³/h. 

Courbe caractéristique de l'essai par paliers (d’après ADEME , BRGM , 2012)

ADEME , BRGM , 2012

Dans un second temps, un essai de pompage longue durée est réalisé. Cette méthode permet de suivre sur une longue période la réponse de l’ aquifère en termes de rabattement et d’évaluer la disponibilité en eau. Les caractéristiques hydrogéologiques ( transmissivité notée T, coefficient d’ emmagasinement noté S) sont déterminées à cette étape. La transmissivité rend compte de la capacité de l’ aquifère à permettre l’écoulement d’eau. Quant au coefficient d’ emmagasinement , il caractérise la capacité de l’ aquifère à libérer un plus ou moins grand volume d’eau pour une perte de charge donnée. A partir de ces paramètres hydrodynamiques, le débit d’exploitation sera alors déterminé. 

De nouvelles méthodes d’interprétation des essais de pompage (méthode des dérivées1) permettent d’identifier les différents régimes d’écoulement et d’en déduire les propriétés du forage et de l’ aquifère incluant l’identification de failles, de phénomènes de drainage et la présence de limites étanches ou de réalimentation. Ces nouvelles méthodes permettent d’améliorer l’interprétation des essais de pompage, notamment dans les milieux fracturés hétérogènes où les méthodes classiques d’interprétation des essais (Theis, Cooper-Jacob) ne sont pas forcément adaptées compte-tenu des hypothèses associées (milieu homogène, écoulement radial).  

En parallèle, des analyses d’eau sont réalisées afin de s’assurer de la qualité chimique et bactériologique de la nappe . 

Tout forage d’eau de plus de 10 m de profondeur doit être déclaré au titre du code minier. 

Ses incidences éventuelles sur l'environnement doivent être évaluées (examen au cas par cas).

Un dossier d’incidence ouvrage (déclaration au titre du code de l’environnement) doit également être transmis à la Police de l’eau avant travaux. 

Après réalisation du forage , un dossier de fin de travaux est transmis à la Police de l’eau ainsi qu’un dossier d’incidence prélèvement . Si les paramètres hydrodynamiques obtenus sont satisfaisants et que l’incidence du forage sur l’environnement est acceptable, alors le forage d’exploitation peut devenir un futur captage pour l’alimentation en eau potable, sous réserve d’autorisation par les services en charge de la police de l’eau. 

Pour davantage d'information sur les procédures réglementaires, consultez la plaquette Le Forage d'eau en Bretagne. La réglementation et les procédures présentées dans la plaquette (illustration 7) concernent que la création d’ouvrage souterrain (rubrique 1.1.1.0 de la nomenclature « Loi sur l’eau »). Il existe également une réglementation et des procédures s’appliquant aux prélèvements d'eau dans ces ouvrages (rubriques 1.1.2.0, 1.2.1.0, 1.2.2.0 et 1.3.1.0 de la nomenclature « Loi sur l’eau »).

Enfin, afin de garantir la protection de la ressource, des périmètres de protection doivent être mis en place par le maitre d’ouvrage autour du forage d’exploitation. Ils sont rendus officiels par Déclaration d’Utilité Publique (DUP).  

• Schroëtter, Jean-Michel ; Boisson, Alexandre ; Lucassou, Flora ; Bader, Anne-Gaëlle ; Beccaletto, Laurent ; Ouerghi, Yamen ; Tourlière, Bruno (2020) - ANAFORE : ANAlyse multicritère des données de FORages les plus productifs de bretagnE - Rapport final. BRGM/RP-70280-FR, 156 p. 
• Talbo, H. et Vaubourg, P. (1977) – Méthodes de recherches d’eau souterraine en milieu fissuré. État des connaissances. Rapport BRGM/77-SGN-358-HYD, 19 p. 
• Mougin, Bruno ; Dewandel, Benoit ; Schroëtter, Jean-Michel ; Petelet-Giraud, Emmanuelle ; Lanini, Sandra ; Boisson, Alexandre ; Charlier, Jean-Baptiste ; Portal, Angélie ; Koch, Florian ; Maurice, Benjamin ; Lucassou, Flora ; Vergnaud, V. (2022) - Amélioration de la compréhension du fonctionnement hydrogéologique du site de l’Aff (communes de Beignon et Paimpont), pour une gestion durable des prélèvements dans les 3 forages FE3, FE4 et FE7. Rapport final BRGM/RP-71294-FR, 254 p., 12 ann.